B - Famille MARTIN BOURTH (EURE)
HISTOIRE D'UN PETIT NORMAND
BOURTH (27) en Normandie
Je suis né dans ce petit village de Normandie pendant l'occupation Allemande le 11 mars 1943, à 8 heures du matin. A la naissance je pesais 3 k 230. Ma mère m'a allaité seulement 8 jours, mais ensuite j'ai été au lait Nestlé, car je ne supportais pas le lait de vache. Pendant le couvre-feu, il fallait camoufler nos lumières avec un gros papier bleu autour des lampes. Ma mère était obligée de me donner mon biberon la nuit en cherchant ma bouche à tâtons, car si jamais elle allumait, les types du poste de garde jetaient des cailloux dans les carreaux de la fenêtre de la chambre. A 3 mois en plein été, j'ai fait une congestion pulmonaire, j'étais aussi très fragile des intestins et avais tendance à avoir de la diarrhée. Quelques temps après aussi, j'ai fait des otites et le docteur est venu chez nous pour me percer les oreilles.
Le 14 juillet 1944, le bruit avait couru que ce jour-là, il n'y aurait pas de bombardements. Ma mère dit à Guy mon grand frère, de rester avec moi à la maison, je n'étais pas très en avance, car je ne marchais pas encore seul, je me tenais quand même debout et commençais à marcher si on me tenait par la main.
Mes parents sont donc allés à leur champ près de la ligne de chemin de fer, ils voulaient ramasser des pommes de terre pour ramener à la maison. Un peu avant le terrain, il y avait une scierie, le patron un copain de mon père ont bu un verre de cidre ensemble, puis ensuite ils repartent vers le terrain. Ils croisent le maréchal-ferrant qui leur dit que ce n'est pas prudent d'aller près de la ligne de chemin de fer. Mes parents bavardaient avec deux amis au milieu de la route, quand tout d'un coup, ma mère entendit un sifflement sans voir d'avion. Les deux hommes avec qui il parlait sont partis se réfugier dans la scierie, alors que mes parents se sont couchés dans le fossé avec ma soeur qui n'avait que 6 ans 1/2, cachée sous ma mère. Elle se débattait et voulait se sauver, ma mère avait bien du mal à la maintenir. Les bombes sont tombées sur la scierie, mes parents et ma soeur recevaient de tout sur eux. Du bois, de la terre, et même un énorme moteur de la scierie est tombé à quelques mètres du fossé où ils étaient.
Les deux hommes qui sont partis dans la scierie, ont été retrouvés en morceaux. Quand cela a été fini, mon père s'est relevé avec ma soeur qui hurlait de peur. Il a été chercher du secours pour ma mère car elle avait une jambe presque entièrement sectionnée, hachée, les os en l'air par morceaux, tibias et péroné, elle ne tenait que par la chair du mollet.
Maintenant, il fallait faire vite pour emmener ma mère à l'infirmerie, une maison, malheureusement située à l'opposé de la ligne de chemin de fer. Ma mère avait de la terre partout, les oreilles, le nez, la bouche. Arrives à l'infirmerie, le docteur et des infirmières ont fait des piqûres pour ma mère pour soutenir le coeur et pour l'infection. Ils ont nettoyé le plus gros et mis une atèle à sa jambe pour la maintenir.
Mon père et ma soeur ont été soignés sur place.
On mit ma mère dans un camion allemand avec d'autre blessés pour la transporter à l'hôpital de Breteuil où elle fut prise en charge.
Quand ma mère s'est réveillée dans une grande salle, son premier réflexe est de tâter sa jambe. Elle s'est alors aperçue qu'elle avait un plâtre sur sa jambe, agréablement surprise, car elle pensait bien sûr qu'à seulement 30 ans, sa jambe était perdue.
Notre maison était proche du champ de foire, les Allemands avaient des camions avec des réserves d'essence, que les pilotes d'avions cherchaient à détruire.
Je n'avais que 16 mois, j'étais resté dans notre maison avec Guy, mon grand frère qui avait 10 ans. Celui-ci me disait qu'en entendant les bombes tomber je disais : BOUM ! BOUM ! et le troisième BOUM était un bombe tombée proche de notre maison. Les vitres ont volé en éclats. Notre maison été détruite. Mon frère m'a donc pris dans ses bras pour sortir de la maison. La porte était bloquée, c'est alors par la porte de derrière que mon frère est sorti.
Dehors le ciel était noir de fumée. Comme le village était plein d'Allemands, l'un d'eux voyant mon frère avec un bébé dans les bras, courir dans la rue, nous a attirés à lui et nous a plaqués le long du mur du maréchal-ferrant. Il y a eu une deuxième vague et l'Allemand est tombé devant nous. Mon frère s'est réfugié avec moi rapidement chez nos voisins proches, qui était, le maréchal-ferrant et sa femme, mais les bombardement étaient terminés.
Nous n'avons jamais su si le soldat Allemand était mort ou simplement blessé.
Pour ma mère, la première opération n'avait pas été concluante car le plâtre était de mauvaise qualité et n'avait pas pris. A la deuxième opération, c'était dans des conditions déplorables, la salle d'opération était toute en verre et juste au moment de l'intervention, les avions se mitraillaient au-dessus de la salle d'opération.
Pour rendre visite à notre mère, comme toutes les voitures avaient été réquisitionnées, c'est en voiture à cheval que l'on faisait les 10 kilomètres de Bourth à Breteuil. Voyant qu'à Breteuil il manquait de tout, le docteur fit transférer ma mère à l'hôpital d'Evreux.
Maintenant, on ne pouvait plus lui rendre visite car c'était trop loin !
Arrivés à Evreux, voyant que ma mère n'avait pas le moral, surtout qu'elle s'éloignait de nous, le docteur console ma mère en lui disant qu'elle avait bien supporté les premières opérations, et qu'il n'y avait pas de raison qu'elle ne supporte pas celle-ci.
Lorsque ma mère s'est réveillée, elle a poussé un soupir de soulagement. Au bout de quelques mois, une très bonne nouvelle pour ma mère, cette fois l'opération avait réussi, les os se ressoudaient bien, le plâtre tenait bon, ce n'était plus qu'une question de temps.
La libération a eu lieu le 22 aoûtt 1944 et les Américains sont venus à l'hôpital serrer la main de tous les blessés. C'est pourtant eux qui avaient blessé avec leurs bombardements !
Mais c'est aussi grâce à eux que la guerre s'est terminée !
Après un long repos, ma mère a pu ensuite remarcher.
Voici notre l'histoire,comment notre famille est sortie de cette journée tragique.
Jean-Pierre
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